Introduction
Le système politique allemand est organisé sous forme de régime parlementaire fédéral avec les Länder d’une part (les États, Land au singulier) et le Bund d’autre part (la Fédération). Nous ne nous intéresserons qu’au niveau fédéral dans cette présentation.
Dans le système allemand, le parlement concentre l’essentiel des pouvoirs, car il peut légiférer seul et dispose de nombreux moyens de contrôle et de pression sur l’exécutif, notamment la possibilité de nommer le Chancelier.
Il s’agit d’un style de démocratie assez éloigné de celui de la Ve République, car ni le Président ni le Chancelier n’est élu au suffrage direct. De plus, le referendum n’est pas un outil prévu par les institutions. L’essentiel de l’activité politique se déroule au Bundestag où le jeu des coalitions et des compromis est permanent.

Pouvoir législatif
Le pouvoir législatif est partagé entre les Länder et le Bund. La Loi fondamentale (la Constitution) détermine les compétences exclusives du Bund (monnaie, nationalité, politique extérieure, etc.) ainsi que les compétences partagées avec les Länder (commerce, travail, écologie, fonction publique, etc.).
Au niveau du Bund, le pouvoir législatif est réparti entre deux chambres : le Bundestag qui représente les citoyens et le Bundesrat qui représente les États.
Le cheminement de la loi dépend de l’institution qui en est à l’origine :
- Lorsque le gouvernement dépose un projet de loi au parlement, celui-ci est d’abord étudié par le Bundesrat, puis par le Bundestag ;
- Lorsque la proposition émane du Bundesrat, elle est transmise au gouvernement, puis celui-ci la dépose au Bundestag ;
- Enfin, quand c’est le Bundestag qui est à l’origine de la proposition, elle est immédiatement débattue, sans passer par d’autres institutions.
En pratique, pour ne pas allonger le processus législatif, le gouvernement fait passer ses projets de loi directement au Bundestag par le biais de son groupe parlementaire.
Dans tous les cas de figure, le projet ou la proposition de loi parvient au Bundestag. Celui-ci commence alors un processus d’examen en trois étapes :
- La première lecture consiste à informer les députés, éventuellement à débattre, ainsi qu’à attribuer le projet à une ou plusieurs commissions parlementaires ;
- À l’issue de ses travaux, la commission parlementaire présente un rapport au Bundestag concernant le projet de loi ;
- Lors de la deuxième lecture, les députés débattent sur le rapport de la commission et votent les différents amendements déposés. Pour accélérer le processus, le Bundestag peut décider de ne pas organiser de deuxième lecture en se prononçant à la majorité des deux tiers ;
- Enfin, en troisième lecture seuls les groupes parlementaires peuvent déposer des amendements avant le vote final du projet de loi.
Une fois la loi adoptée par le Bundestag, elle est transmise au Bundesrat qui ne peut pas la modifier. Deux cas de figure se présentent, selon que la loi impacte ou non les Länder :
- Si la loi impacte les Länder (environ 60 % des cas), alors l’approbation du Bundesrat est indispensable pour faire entrer la loi en vigueur ;
- Si la loi n’impacte pas les Länder et que le Bundesrat n’approuve pas la loi, celle-ci est renvoyée au Bundestag qui doit à nouveau voter le texte pour outrepasser ce veto.
Une fois l’étape d’approbation du Bundestag passée, la loi est transmise au Président fédéral pour être promulguée.
En matière constitutionnelle, toute modification de la Loi fondamentale doit être approuvée par les deux tiers des deux chambres. Cependant, certains articles de la Loi fondamentale ne peuvent pas être modifiés par le parlement (organisation en fédération, droits fondamentaux, etc.), dans ce cas une nouvelle Constitution doit être adoptée par voie de referendum.
Le Bundestag
Le Bundestag est composé de 598 députés qui sont élus pour 4 ans selon un processus électoral qui combine le système majoritaire et proportionnel :
- Lors des élections fédérales, les citoyens allemands ont chacun deux voix : la première leur permet de choisir un candidat de leur circonscription (il y en a 299) et la seconde leur permet de voter pour une liste de candidats présentée par un parti politique de leur Land ;
- Les 598 sièges sont répartis entre les différents partis ayant obtenu plus de 5 % des voix au niveau national ;
- Puis, à l’intérieur des partis, les sièges sont individuellement attribués dans l’ordre suivant :
- D’abord aux candidats ayant été élus dans les 299 circonscriptions avec la première voix (au scrutin majoritaire) ;
- Puis aux candidats présentés sur les listes des Länder.
Lorsque le nombre de candidats élus au scrutin majoritaire excède le nombre de sièges attribués à un parti politique, des mandats supplémentaires sont créés. Pour respecter la proportionnalité du Bundestag, des mandats sont également attribués aux autres partis.
Lors des élections fédérales d’octobre 2021, le parti CSU a remporté les élections dans 45 circonscriptions sur 299, mais le système proportionnel ne lui allouait que 6 % des sièges du Bundestag, soit 35 sièges sur 598. Ainsi, 10 mandats supplémentaires ont dû être créés pour le CSU, et 128 pour les autres partis afin de maintenir la proportionnalité de l’assemblée. Le Bundestag de la 20e législature comprend donc 736 députés au lieu de 598.
Le Bundestag est composé de 23 commissions parlementaires correspondant aux 23 ministères de la Fédération. Ces commissions jouent un rôle majeur dans le processus d’élaboration des lois et des amendements. Dans le cadre de leurs travaux, elles peuvent auditionner des experts et des groupes d’intérêts. Parallèlement, le Bundestag est divisé en groupes parlementaires correspondant aux différents partis politiques ou coalitions.
Le Comité des doyens comprend les présidents des différents groupes parlementaires ainsi que d’autres députés expérimentés choisis en leur sein. Le rôle du Comité est central, puisqu’il nomme les différents présidents de commissions parlementaires et qu’il détermine l’ordre du jour du Bundestag.
En plus de son rôle prééminent dans le processus législatif, le Bundestag dispose d’autres prérogatives, notamment l’élection du chancelier fédéral et la ratification des traités internationaux. Les députés du Bundestag peuvent également déposer une motion de défiance afin de remplacer le Chancelier par un autre.
Le Bundestag est doté de plusieurs outils afin de contrôler le pouvoir exécutif :
- Les députés peuvent régulièrement poser des questions au gouvernement ;
- Les commissions parlementaires peuvent poser des questions et exiger des rapports du ministère concerné ;
- Parmi ces commissions, la commission des pétitions dispose d’un statut particulier, elle peut exiger des dossiers et accéder à des installations gouvernementales à la suite d’une requête citoyenne ;
- Des commissions d’enquête ad hoc peuvent également être constituées afin de contrôler une ou plusieurs missions du gouvernement.
Le Bundesrat
Le Bundesrat comprend actuellement 69 membres répartis en 16 Länder. Le nombre de sièges par Land dépend de sa démographie :
- Moins de 2 millions d’habitants : 3 sièges
- Entre 2 et 6 millions d’habitants : 4 sièges
- Entre 6 et 7 millions d’habitants : 5 sièges
- Plus de 7 millions d’habitants : 6 sièges
Les membres du Bundesrat ne sont pas élus, mais issus des gouvernements des Länder. Seuls les membres de la majorité de chaque Land sont donc représentés.
Le système démographique favorisant les petits Länder et les élections des Länder n’étant pas synchronisées avec les élections fédérales, il se peut que la majorité au Bundestag soit différente de la majorité au Bundesrat. Cette cohabitation peut entraîner des blocages dans les cas où le Bundesrat dispose d’un veto absolu sur les lois qui impactent les Länder.
La présidence du Bundesrat passe tous les ans d’un Land à l’autre, représenté par son chef de gouvernement. Le président du Bundesrat est le premier dans l’ordre de succession du Président fédéral.
Pouvoir exécutif
Chancelier
Le Chancelier est élu par le Bundestag au scrutin secret et est formellement nommé par le Président fédéral. La durée de son mandat n’est pas fixée, il ne peut être démis de ses fonctions que par une motion de défiance du Bundestag qui nomme son successeur.
Depuis 1949, l’Allemagne a connu neuf chanceliers, dont les mandats les plus longs été occupés par Konrad Adenauer (14 ans), Helmut Kohl (16 ans) et Angela Merkel (16 ans).
Le Chancelier est le chef du gouvernement, il fait nommer ses ministres par le Président fédéral et les révoque de la même manière. Il fixe les orientations générales de la politique de l’État.
Le Président fédéral
Le Président fédéral est élu tous les cinq ans par un collège électoral composé de tous les députés du Bundestag ainsi que d’autant de représentants élus par les parlements des Länder. Il ne peut exercer plus de deux mandats.
Il est le chef d’État de l’Allemagne et est garant du bon fonctionnement des institutions et de la cohésion nationale. S’il est théoriquement censé représenter la République à l’étranger, c’est généralement le Chancelier qui s’en occupe.
Le Président peut dissoudre le Bundestag si celui-ci ne parvient pas à élire de Chancelier ou bien si le Bundestag rejette la question de confiance du Chancelier.
Depuis 1949, le Président fédéral a dissout par trois fois le Bundestag (1972, 1983 et 2005), à chaque fois dans le cadre d’une manœuvre politique de la majorité qui, souhaitant avancer les élections fédérales, provoque une dissolution en refusant de voter la question de confiance du Chancelier.
C’est aussi le Président fédéral qui promulgue les lois votées par le parlement.
Depuis 1949, le Président fédéral a refusé de promulguer une loi à huit occasions, généralement pour des raisons de formalisme ou de constitutionnalité. Ce pouvoir de promulgation n’est donc pas anodin.
Il dispose d’autres rôles inscrits dans la Constitution, tels que la nomination et la révocation des ministres ou des juges fédéraux, mais tous ces actes sont subordonnés à la volonté du Chancelier. Le Président fédéral n’a donc qu’un rôle protocolaire dans ces autres domaines.
Pouvoir judiciaire
Le Tribunal constitutionnel fédéral est la plus haute cour du système judiciaire allemand. Il est composé de 16 juges nommés pour 12 ans par le Bundestag et le Bundesrat.
Le Tribunal juge de la constitutionnalité des lois adoptées par le Bundestag et des décisions administratives, s’occupe des litiges entre institutions, et peut interdire un parti politique.
La Cour fédérale est la juridiction de dernier ressort de l’ordre judiciaire (équivalent de la Cour de cassation en France). Ses juges sont nommés par le ministre fédéral de la Justice en concertation avec les ministres de la Justice des Länder et le Bundestag.
Sources
Cheminement législatif (FR) – bundestag.de
Loi fondamentale pour la République fédérale d’Allemagne (FR)