Tirage au sort dans la République de Genève

Contexte historique

Avant de devenir le 22e canton de la Confédération Suisse en 1815, la République de Genève était un État indépendant, émancipé du Saint Empire romain germanique depuis 1648.

À la fin du XVIIe siècle, la République de Genève est une démocratie de droit, puisque c’est le Conseil général (l’assemblée des bourgeois de la cité) qui détient la souveraineté. Néanmoins, dans les faits, la République est aristocratique car le pouvoir est occupé par des familles de la noblesse locale : les patriciens. Ils occupent le Petit conseil et le Grand conseil qui disposent d’un important pouvoir décisionnel dans la République.

Tout comme dans la République de Venise, il existe une crainte permanente de l’accaparation du pouvoir par une seule famille de patriciens, conduisant à l’éviction de toutes les autres familles, et provoquant la chute de la République au profit du despotisme. À Genève, on cherche en particulier à éviter les brigues, c’est-à-dire l’octroi d’une charge en échange de faveurs, et l’achat de votes. Pour ce faire, on demande aux électeurs de prêter serment avant de voter, de sorte qu’ils ne formulent leur choix ni par haine ni par faveur. Néanmoins, le système des serments est de moins en moins craint par la population d’un point de vue religieux.

Introduction du tirage au sort

Le 1er novembre 1691, le syndic de Genève (plus haute fonction exécutive), annonce que les élections des auditeurs (magistrature par laquelle tous les jeunes aristocrates font leur entrée en politique) comporteront désormais une part de tirage au sort afin de « rendre la nomination incertaine ».

Six candidats sont choisis par le Petit conseil, puis, le jour de l’élection, un jeune enfant tire au sort une boule d’un sac pour chaque candidat devant les yeux de tous les citoyens présents. Les deux qui reçoivent une boule noire sont éliminés de la procédure. Puis les citoyens (membres du Conseil général) votent parmi les quatre candidats restant afin d’en retenir deux qui deviendront auditeurs.

Le tirage au sort est donc utilisé de manière dissuasive pour empêcher les brigues : les candidats proposés par le Petit conseil ne sont jamais assurés d’obtenir la charge d’auditeur avant le tirage au sort (même s’ils ont un soutien populaire), puisque le tirage d’une boule noire peut les éliminer quel que soit leur statut. Ainsi, les démarches en vue d’acheter des votes sont bien plus coûteuses, car potentiellement inefficaces.

Autres usages du tirage au sort en Suisse

À partir de 1718, le canton de Bâle introduit également le tirage au sort dans ses institutions afin d’éviter les manipulations. La règle est simple : si une intrigue est révélée autour de l’élection, alors les charges seront attribuées par tirage au sort. Il s’agit donc d’une menace en cas de non respect des principes républicains.

Dans le canton de Berne, les membres du Petit Conseil sont nommés suivant une procédure complexe qui mêle cooptation, nomination par le Grand conseil et tirage au sort.

Dans plusieurs cantons (Schwyz et Glaris notamment), les candidats aux magistratures doivent subir un parcours électoral particulier : en premier lieu ils doivent payer une somme d’argent au canton, ensuite ils doivent avoir été désignés par les citoyens (vote à main levée), puis enfin ils sont tirés au sort parmi les autres candidats à la fonction visée.

Source

BARAT – Introduction du tirage au sort dans la République de Genève en 1691 – (2019)

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