Introduction
Les États-Unis sont une République fédérale composée de 50 États qui disposent de leur propre gouverneur et législature. Nous nous intéressons ici au fonctionnement du pouvoir fédéral.
La démocratie américaine est organisée sous la forme d’un régime présidentiel, c’est-à-dire qu’il existe une nette séparation entre le pouvoir exécutif et législatif. Ainsi le Président ne peut ni déposer des projets de loi ni dissoudre le Congrès. En retour, il n’est pas responsable devant le pouvoir législatif puisqu’il est élu par les citoyens américains via le système des grands électeurs. Nous verrons que cette séparation a quelques exceptions, comme la procédure d’impeachment qui permet au Congrès de destituer le Président et le droit de veto de ce dernier sur les propositions de loi.

Pouvoir législatif
Le pouvoir législatif est représenté par le Congrès (Parlement) qui comprend deux chambres : la Chambre des représentants (chambre basse) et le Sénat (chambre haute). Les pouvoirs de ces deux institutions sont très proches, même si leur composition et leur représentation sont très différentes.
L’une ou l’autre des chambres peut initier une proposition de loi dans les domaines prévus par la Constitution, notamment : la fiscalité, le commerce, l’emprunt d’État, la création monétaire, la déclaration de guerre, l’armée, etc. Les autres domaines sont du ressort des législations des États membres de la fédération.
Pour qu’une proposition de loi soit transmise au Président en vue d’être promulguée, elle doit être votée sur un texte identique par chacune des deux chambres.
Des commissions parlementaires spécialisées sont chargées d’élaborer et d’amender les propositions de loi. Ces commissions sont généralement présidées par des membres de la majorité. Les commissions peuvent organiser des audiences pour écouter les différentes parties prenantes concernées par la proposition de loi (citoyens, entreprises, groupes d’intérêts, etc.). Une fois les travaux parlementaires suffisamment avancés, la commission vote à la majorité simple la décision de soumettre la proposition au vote de la chambre concernée.
Cependant, l’ordre du jour de chaque chambre est décidé par sa majorité. Dans le cas de la Chambre des représentants, c’est le chef du parti majoritaire qui décide des propositions de loi à soumettre au vote, tandis qu’au Sénat, c’est l’ensemble des membres qui décident de l’ordre du jour, grâce à un système de motions.
Quand une proposition de loi est votée par une chambre, elle est transmise à l’autre chambre qui doit se prononcer sur le même texte. Soit la chambre approuve la proposition, dans ce cas elle est transmise au Président pour promulgation, soit elle l’amende et la renvoie à la chambre d’origine et ainsi de suite. Si cette navette législative ne permet pas aux deux chambres de s’accorder sur une proposition commune, un comité de conférence peut être réuni afin d’élaborer une proposition tenant compte des amendements de chaque chambre. Cette proposition doit ensuite être adoptée par les deux chambres.
Contrairement à la Ve République où l’Assemblée nationale a le dernier mot en cas de litige avec le Sénat, dans le modèle américain, une proposition de loi peut rester bloquée indéfiniment si les deux chambres ne parviennent pas à trouver d’accord.
Pour ajouter de nouveaux amendements à la Constitution, il est nécessaire d’obtenir la majorité des deux tiers dans chaque chambre ainsi que l’approbation d’au moins trois quarts des législatures d’État.
Chambre des représentants
Composée de 435 représentants élus au suffrage universel direct pour 2 ans, la Chambre représente les citoyens américains. L’élection se déroule au scrutin uninominal majoritaire à un tour, en même temps que les élections sénatoriales et, une fois sur deux, les élections présidentielles.
Les circonscriptions électorales ne sont pas fixes et peuvent évoluer au gré des changements démographiques. Elles sont décidées par les États eux-mêmes, ce qui génère souvent du gerrymandering, c’est-à-dire un remaniement des circonscriptions dans le seul but de manipuler le résultat des élections en étouffant les minorités. Cela a conduit à une situation où de nombreuses circonscriptions sont acquises soit aux Démocrates, soit aux Républicains.
Seule la Chambre des représentants peut initier une proposition de loi relative au budget fédéral.
Seule la Chambre des représentants peut déclencher une procédure d’impeachment afin de destituer un haut fonctionnaire (Président, secrétaires d’État, et juges fédéraux) qui aurait commis un acte de « trahison, corruption ou tout autre crime ou délit majeurs ». L’impeachment doit être voté à la majorité simple, puis un procès a lieu devant le Sénat qui prononce son jugement à la majorité des deux tiers.
L’impeachment a été déclenché une soixantaine de fois depuis 1787 et a donné lieu à sept condamnations. Seuls les présidents Andrew Johnson (1868), Bill Clinton (1998) et Donald Trump (2019 et 2021) ont été visés par la procédure, mais acquittés par le Sénat. En outre, Richard Nixon a démissionné en 1974 sachant que la Chambre des représentants préparait son impeachment.
Sénat
Chacun des 50 États est représenté au Sénat par deux sénateurs, soit un total de 100 sénateurs. Ceux-ci sont élus au suffrage universel direct pour six ans, avec une rotation par tiers tous les deux ans. Le Sénat est présidé par le Vice-Président, élu en même temps que le Président.
Seul le Sénat est en mesure de ratifier les traités internationaux signés par le Président (à la majorité des deux tiers).
Les règles de fonctionnement du Sénat favorisent en théorie une discussion plus raisonnée et moins partisane qu’à la Chambre des représentants. En outre, la fonction de sénateur est perçue comme plus prestigieuse que celle de représentant.
Pouvoir exécutif
Le Président
Le Président est élu au suffrage indirect via un collège électoral. Celui-ci compte autant de membres que ceux du Congrès plus trois, soit 538 grands électeurs. Ainsi, chaque État dispose d’un nombre de grands électeurs équivalent à celui de ses sénateurs et représentants.
La procédure électorale se déroule de la manière suivante :
- Chaque parti politique présente ses candidats à l’élection présidentielle ;
- Dans chaque État, les partis nomment leurs grands électeurs selon des modalités variables ;
- Le jour des élections, les citoyens votent pour le candidat à l’élection présidentielle de leur choix ;
- Dans tous les États, sauf le Maine et le Nebraska, la règle du winner-takes-all s’applique, c’est-à-dire que le parti politique qui obtient la majorité des suffrages récupère 100 % des sièges de grand électeur de l’État. Pour le Maine et le Nebraska, les sièges de grands électeurs sont attribués par circonscription électorale ;
- Un mois plus tard, les 538 grands électeurs votent pour un Président et un Vice-Président ;
- Si aucun candidat ne parvient à obtenir la majorité absolue (ce qui n’est possible qu’avec une égalité parfaite ou s’il y a plus de deux candidats), alors c’est la Chambre des représentants qui se charge d’élire le Président et le Sénat qui élit le Vice-Président.
Ce système électoral indirect est cohérent avec la logique fédérale, mais il peut sembler défectueux d’un point de vue démocratique puisqu’à cinq reprises (1824, 1876, 1888, 2000 et 2016) le Président élu par les grands électeurs n’a pas remporté une majorité des suffrages populaires.
Le Président est chef d’État et chef de gouvernement. La Constitution lui octroie des prérogatives en matière diplomatique et militaire. Il est le commandant en chef des armées et peut réquisitionner la Garde nationale.
Le Président nomme de nombreux hauts fonctionnaires : ambassadeurs, procureurs, consuls, juges, etc. Ces nominations doivent cependant être approuvées par le Sénat afin d’entrer en vigueur.
Bien qu’en théorie le Président ne dispose d’aucune prérogative en matière législative, en pratique c’est lui et son cabinet qui sont à l’origine de la majorité des propositions de loi. En outre, pour « exécuter » les lois, le Président publie des décrets d’application des lois votées par le Congrès.
Le Président peut refuser de promulguer les lois votées par le Congrès. Cependant, le Congrès peut outrepasser ce veto s’il parvient à faire voter la loi dans les deux chambres à la majorité de deux tiers.
Le gouvernement
Le gouvernement (Administration) est divisé en 15 départements (agriculture, commerce, défense, éducation, etc.), chacun dirigé par un secrétaire d’État. Le Président assume directement le rôle de chef de gouvernement et dispose d’un cabinet pour le conseiller dans cette tâche.
À la différence des régimes parlementaires, les membres du gouvernement sont rarement issus du monde politique et sont plutôt choisis dans la haute administration.
Pouvoir judiciaire
Le pouvoir judiciaire fédéral se compose de la Cour suprême, de 12 cours d’appel et de 94 cours de district. La Cour est dite « suprême », car ses décisions ne peuvent faire l’objet d’aucun recours. Elle se compose de 9 juges nommés à vie par le Président avec accord du Sénat. Un juge de la Cour suprême ne peut être déchargé de son mandat que pour trois raisons : le décès, la démission, ou la procédure d’impeachment.
La Cour suprême a quelques attributions anecdotiques comme les affaires impliquant des États de l’Union ou des diplomates étrangers, cependant son principal rôle consiste à interpréter la Constitution, via son pouvoir de contrôle de la constitutionnalité des lois. Ce contrôle a toujours lieu a posteriori, c’est-à-dire une fois que les lois sont en vigueur. Si la Cour qualifie une loi d’inconstitutionnelle, cela n’a pas pour effet de l’abroger, mais la décision entre dans la jurisprudence et la loi ne peut plus être correctement appliquée.