La géographie politique d’Athènes

Athènes est la plus grande cité-État du monde grec. Sa population varie entre 30 000 et 60 000 citoyens mâles pour 300 000 habitants au total. Quand on parle d’Athènes, on inclut l’ensemble de la péninsule de l’Attique (2500 km²) qui est sous son contrôle direct.

Réforme de Clisthène

En -507, Clisthène entreprend une profonde réforme du territoire de l’Attique qui, jusque là, était réparti en quatre tribus (circonscriptions).

Il crée 139 dèmes, le plus petit échelon territorial. À la campagne, il s’agit le plus souvent d’un village ; à Athènes, c’est un quartier de la cité. Certains dèmes sont très peuplés, d’autres beaucoup moins.

Les dèmes sont regroupés en 30 trittyes, c’est-à-dire des petites circonscriptions. Les trittyes sont de trois types différents selon leur emplacement : la côte, la campagne, ou la ville (Athènes est la seule ville de l’Attique).

Enfin, les trittyes sont elles-mêmes regroupées au sein de dix tribus, c’est-à-dire des grandes circonscriptions. Toutefois, puisque les tribus doivent comporter une trittye de chaque type, leur domaine n’est pas continu et certaines se retrouvent avec trois morceaux de territoire à des coins opposés de l’Attique. Pour ne rien arranger, Clisthène a réparti les trittyes entre les dix tribus par tirage au sort.

Les tribus

Les tribus sont à la base du fonctionnement politique d’Athènes. Elles divisent le territoire et la population d’Athènes en dix groupes distincts. Elles ont trois présidents, un pour chaque trittye, qui organisent les différentes assemblées de la tribu.

Tous les collèges de magistrats d’Athènes sont de dix citoyens, un pour chaque tribu. La Boulè comprend 500 membres tirés au sort, 50 par tribu. À l’armée, les soldats d’une tribu se battent côte à côte contre les ennemis de la cité. Les Athéniens ont à cœur de représenter chaque tribu dans les instances de pouvoir. Pourtant, il y a assez peu de choses qui lient les membres d’une tribu entre eux.

À l’origine, les tribus ont un sens familial : tous les membres sont supposés descendre d’un ancêtre mythique, voire divin. Chaque tribu est donc représentée par un héros d’Athènes : Égée, un roi mythique de la cité (2e tribu), ou encore Ajax, un héros de la guerre de Troie (9e tribu). Ces figures mythologiques ont toutes leur sanctuaire à Athènes où la tribu se réunit pour gérer ses affaires.

L’appartenance à une tribu n’est pas basée sur le droit du sol, mais sur le droit de sang. Au fil des décennies et des déplacements de population de la campagne vers la ville, les tribus et les dèmes perdent leur ancrage territorial. Beaucoup de citoyens censés appartenir à un dème quelconque de l’arrière-pays vivent en fait à Athènes toute l’année. Cela n’empêche pas les tribus d’organiser des assemblées et de gérer leurs affaires conformément à la réforme de Clisthène.

Les trittyes

Les trittyes sont des circonscriptions côtières, rurales ou urbaines. Elles regroupent un certain nombre de dèmes et font partie d’une tribu (une trittye de chaque type).

Ces circonscriptions ne jouent pas un rôle important dans la politique athénienne. Les représentants des tribus sont souvent un multiple de trois pour que chaque trittye soit représentée.

Les dèmes

Les dèmes, la plus petite division du territoire, sont essentiels pour gérer les affaires locales. Leur taille varie de 50 citoyens mâles s’il s’agit d’un petit village à plus de 1000 si l’on parle d’une petite ville entourée de campagne. Une assemblée se réunit régulièrement pour prendre des décisions au niveau du dème, elle est présidée par un démarque élu ou tiré au sort selon les dèmes.

Les dèmes ont un rôle majeur dans le contrôle de la citoyenneté, car les assemblées comptent un nombre raisonnable de membres et tout le monde se connait de vue. Il est alors plus facile d’attester que tel ou tel Athénien est bien celui qu’il prétend être, qu’il est né à tel endroit et de tels parents. Il serait impossible de contrôler la citoyenneté depuis Athènes pour les 30 000 citoyens mâles de l’Attique.

Du fait que les dèmes tiennent un registre de leurs membres, ils sont responsables de la conscription en temps de guerre. Les dèmes doivent également envoyer un nombre minimal de candidats pour le tirage au sort des bouleutes, chaque dème a un nombre de sièges fixe, proportionnel à leur population d’origine (quand celle-ci s’éloigne trop de la population réelle, des ajustements sont nécessaires).

Le dème est une part intégrante de l’identité de chaque citoyen et ceux-ci l’ajoutent toujours à leur nom et patronyme quand ils se présentent : Démosthène, fils de Démosthène, du dème de Paiania.

Comme pour les tribus, l’appartenance aux dèmes devient héréditaire avec la réforme de Clisthène. Ils perdent donc leur ancrage au fur et à mesure que ses membres se déplacent dans l’Attique. Le mouvement se fait essentiellement des campagnes vers Athènes, où l’on trouve la plus grande concentration de citoyens. Vers la fin de la démocratie, il est fréquent d’organiser les assemblées des dèmes directement à Athènes plutôt que sur leur territoire d’origine.

Conclusion

La réforme de Clisthène, aussi complexe et étrange puisse-t-elle paraître, a un intérêt politique : en divisant le territoire de manière discontinue entre plusieurs groupes de citoyens, elle empêche la formation de factions territoriales qui sont souvent le nid des révoltes oligarchiques.

Source

HANSEN – La démocratie athénienne à l’époque de Démosthène (p. 81-90, p. 131-136)

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