Contexte

La Communauté germanophone de Belgique est une entité linguistique à l’intérieur du Royaume de Belgique, au même titre que la communauté francophone et néerlandophone. Elle représente environ 70 000 habitants et dispose de son propre Parlement de 25 députés élus tous les 5 ans. Ce pouvoir législatif est compétent pour prendre des décrets et voter le budget de la communauté.
Dès 2017, le Parlement a testé le concept des Dialogues citoyens sur le thème de la garde d’enfants dans le but de favoriser la participation des citoyens et de légitimer la décision publique. En 2018, le Parlement se rapproche de l’organisation G1000 et de plusieurs experts internationaux pour institutionnaliser la pratique, ce qui amène à la publication d’un décret pour encadrer le processus en 2019.
Fonctionnement

Le Conseil citoyen
Au centre du Dialogue citoyen, il y a le Conseil citoyen, composé de 24 citoyens tirés au sort parmi les anciens membres des Assemblées citoyennes (vues après). Leur mandat est de 18 mois et se renouvelle par tiers tous les 6 mois afin d’assurer un roulement progressif. Ce Conseil est une institution permanente dont la mission principale consiste à organiser des Assemblées citoyennes quand le besoin s’en fait sentir.
Le Secrétaire permanent est un fonctionnaire du Parlement chargé d’assister le Conseil citoyen dans ses travaux (le décret précise que le Conseil est « habilité à lui donner des ordres »). C’est notamment lui qui s’occupe de la gestion de la logistique des assemblées citoyennes, la prise de contact avec les experts, la mise en place du budget, et l’organisation du tirage au sort des citoyens. Le Conseil choisit lui-même la documentation, les animateurs et les parties prenantes qui interviendront dans l’Assemblée. C’est aussi lui qui détermine, la date, le lieu et la durée de l’Assemblée.
Le Conseil se réunit automatiquement au début de la session annuelle du Parlement pour choisir les thèmes des futures Assemblées citoyennes. Ces thèmes peuvent être proposés par les membres du Conseil, le gouvernement, le Parlement, ou le reste des citoyens via une pétition de 100 signatures au moins.
Le Conseil ne peut convoquer que trois Assemblées citoyennes au maximum chaque année. En outre, il faut au minimum une Assemblée par an pour assurer le renouvellement des mandats du Conseil.
Le Conseil prend ses décisions à la majorité des deux tiers, avec un quorum égal à la moitié des membres.
Le budget de l’ensemble du processus est adopté par le Conseil citoyen et validé ou rejeté par le Parlement. Les fonds sont directement prélevés sur le budget de fonctionnement du Parlement.
Les Assemblées citoyennes
La taille des Assemblées varie de 25 à 50 citoyens tirés au sort parmi les citoyens de plus de 16 ans. Les élus, les membres du gouvernement et les magistrats sont exclus d’office du tirage au sort. Les citoyens peuvent refuser de siéger.
Le tirage au sort s’effectue selon une méthode d’échantillonnage stratifié. Plusieurs critères génériques sont retenus (genre, âge, etc.), mais le Conseil citoyen peut retenir d’autres critères selon le thème de l’Assemblée.
Les décisions de l’Assemblée sont prises par voie de consensus et, à défaut, à la majorité des quatre cinquièmes. Le cas échéant, les motifs de rejet de la minorité sont toujours joints à la décision collective.
Après une période de formation, les membres de l’Assemblée délibèrent sur le thème mis à l’ordre du jour et élaborent des recommandations.
Ces recommandations sont ensuite transmises au Parlement lors d’une réunion publique. Elles sont examinées par la commission parlementaire compétente et les ministres concernés, puis font l’objet d’un avis sur leur faisabilité et leur potentielle mise en œuvre.
Dans un second temps, la commission parlementaire débat de cet avis avec les membres de l’Assemblée lors d’une séance publique.
Enfin, dans un troisième temps, le Parlement rend compte des actions qu’il a mises en œuvre pour remplir ses objectifs.
Résultats
Cinq Assemblées citoyennes ont été convoquées depuis 2020 sur les thèmes suivants :
- Soin de santé (4 jours de délibérations)
- Éducation inclusive (4 jours de délibérations)
- Logement (6 jours de délibérations)
- Compétences numériques (5 jours de délibérations)
- Intégration des migrants (5 jours de délibérations)
De manière générale, les recommandations de l’Assemblée sont assez nombreuses et la commission parlementaire prend le temps d’y répondre point par point au cours de longs débats, en expliquant ce qu’il est possible ou non de faire. La plupart du temps, la commission parlementaire agrée aux recommandations des citoyens et décline la mise en œuvre concrète de leurs idées.
Conclusion
Il est encore trop tôt pour dresser des conclusions sur l’efficacité du dispositif, car appliquer des recommandations peut demander beaucoup de temps selon les sujets.
En outre, le dispositif n’a pour le moment connu qu’une seule législature, la prochaine épreuve sera de savoir s’il résiste aux élections législatives de 2024 et à un éventuel changement de majorité.
Mais on peut déjà saluer le respect de tous les engagements initiaux : le Conseil citoyen fonctionne, il organise des Assemblées régulièrement et produit un véritable travail de réflexion. Il a d’ailleurs inspiré le dispositif des commissions délibératives au Parlement francophone de Bruxelles et au Parlement de Wallonie.
Sources
Décret instituant un dialogue citoyen permanent en Communauté germanophone (FR)