Contexte
Suite à une première convention citoyenne nationale qui s’est déroulée à Leipzig en 2019, le Bundestag a décidé d’organiser une seconde convention en 2020 portant sur le thème de la place de l’Allemagne dans le monde.
Ce sujet est lié à la pandémie de COVID-19, le pouvoir politique ayant dû prendre des décisions rapides et faire des arbitrages entre les priorités nationales et la coopération internationale. Cependant, le thème de la convention n’est pas centré autour de la pandémie, il s’agit de travailler autour de cinq axes de réflexion :
- Paix et sécurité
- Démocratie et État de droit
- Économie et commerce (notamment les relations germano-chinoises)
- Développement durable
- Union européenne
Le Bundestag souhaite expérimenter le concept de Convention citoyenne pour voir dans quelle mesure les recommandations citoyennes peuvent s’intégrer dans les travaux parlementaires. Il y a donc une volonté d’institutionnalisation de la pratique, si elle se révèle fructueuse.
La Convention
Composition
La Convention est composée de 169 citoyens tirés au sort selon la méthode de l’échantillonnage stratifié. Plutôt que de réaliser le tirage au sort sur un registre national, 84 municipalités allemandes sont choisies au hasard dans quatre catégories (< 5 000 hab. ; < 20 000 hab. ; < 100 000 hab. ; > 500 000 hab.). Puis elles sont invitées à tirer au sort un certain nombre d’habitants sur les registres communaux avec une parité homme femme.
La comparaison de l’échantillon avec les statistiques nationales souligne une forte disparité en ce qui concerne le niveau d’éducation. C’est pourquoi un second tirage au sort a lieu à l’échelle nationale pour recruter spécifiquement des citoyens peu diplômés. Malgré ces efforts pour réajuster la représentativité de l’échantillon, la disparité subsiste : 53,8 % des participants ont l’équivalent du baccalauréat, alors que seuls 32 % de la population disposent de ce diplôme.
Fonctionnement
La Convention citoyenne s’organise en quatre phases.
Première phase : avant le lancement à proprement parler de la Convention, il faut délimiter le sujet « le rôle de l’Allemagne dans le monde » qui est très vaste. Pour ce faire, de nombreux acteurs font part des thèmes qu’ils souhaitent voir mis en avant :
- Les groupes parlementaires du Bundestag ;
- Des experts de la société civile (dans le domaine des Affaires étrangères, de la sécurité, du commerce extérieur et de la politique internationale) ;
- Des citoyens tirés au sort lors de quatre tables rondes en ligne ;
- L’ensemble des citoyens via une enquête représentative ;
En coopération avec les experts de la participation, les représentants des groupes parlementaires élaborent la feuille de route de la Convention en fonction des différentes suggestions de thèmes.
Deuxième phase : les citoyens sont tirés au sort et la Convention peut démarrer. Dix sessions en ligne sont organisées entre le 13 janvier et le 20 février 2021. Les 169 membres de la Convention sont répartis dans des petits groupes de six à huit personnes. Les citoyens décident eux-mêmes de l’ordre du jour. Des experts sont à disposition des citoyens et peuvent intervenir dans les sous-groupes afin d’éclaircir certains points.
À la fin de cette phase, les recommandations élaborées par les différents sous-groupes sont mises au vote en assemblée plénière.
Troisième phase : un rapport est rédigé par les organisateurs avec la participation de certains volontaires de la Convention, afin de présenter le processus et les recommandations. Ce rapport est ensuite remis au président du Bundestag lors d’une cérémonie publique.
Quatrième phase : les membres de la Convention continuent, tout au long de l’année 2021, de faire la promotion de leur rapport auprès des ministres concernés, des groupes parlementaires, des commissions parlementaires, de la chancellerie, etc.
Résultats
Il semblerait que la coalition SPD, Verts, et FDP qui accède au pouvoir en décembre 2021, se soit partiellement inspiré des recommandations de la Convention citoyenne dans son contrat de coalition.
Conclusions
Le Bundestag a confié une question éminemment sensible à la Convention : comment les citoyens perçoivent-ils le rôle de l’Allemagne dans le monde ? Ce genre de sujet est généralement la chasse gardée du ministère des Affaires étrangères et plus largement du gouvernement. On peut y voir une marque de reconnaissance de la part du pouvoir politique pour l’opinion citoyenne.
Cependant, on peut aussi se demander si cette convention n’était pas qu’un simple instrument politique dans le cadre des élections fédérales de septembre 2021. Car, comme bien souvent, les citoyens, malgré leur bonne volonté, n’avaient ni le temps ni les moyens suffisants pour véritablement s’attaquer aux sujets vastes et complexes qui leur étaient confiés. Leurs recommandations étaient donc limitées et souvent inspirées par les différents experts auditionnés.